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Visite de la chocolaterie Poulain de Blois en 1966, le «temple de la gourmandise»

Visite de la chocolaterie Poulain de Blois en 1966, le «temple de la gourmandise»

L'usine de chocolat Poulain de Villebarou, près de Blois, ne va pas fermer, elle est reprise par le groupe Andros. Il fut une époque où cette entreprise était la plus grande fabrique de chocolat d'Europe. Au milieu des années 60, à son apogée, la chocolaterie ouvrait ses portes à la télévision.

Par Florence Dartois - Publié le 13.06.2024 - Mis à jour le 11.09.2024
Blois : fabrication de chocolat - 1966 - 05:09 - vidéo
 

L'ACTU.

Le confiseur français Carambar & Co, propriétaire de la marque de chocolat Poulain, a annoncé le 10 septembre 2024 que «les bases d'un accord de reprise» avaient été conclues avec le groupe Andros pour l'usine historique du chocolatier implantée à Villebarou, près de Blois (Loir-et-Cher).

SON HISTOIRE.

Avec l'annonce de cette reprise, c'est tout un pan de l'histoire industrielle de Blois qui respire. En effet, la marque existe depuis 1848, date à laquelle elle fut créée par Victor-Auguste Poulain, un commis épicier de 23 ans qui fut le premier à sentir le potentiel commercial que détenait le cacao. Il fera de ce breuvage doux-amer une douceur sucrée appréciée des petits et des grands. Dans une France d'après-guerre, longtemps privée de chocolat, la marque Poulain allait devenir l'un des fleurons industriels de la région, jusqu'à tenir, dans les années 60 à 80, le rang de leader du chocolat fabriqué en France.

Blois : l'entreprise Poulain
1983 - 01:52 - vidéo

« De génération en génération, le chocolat Poulain se vend comme si un contrat de confiance était signé ». Reportage de 1983 consacré au marketing au sein de la chocolaterie Poulain, installée depuis le XIXᵉ siècle à Blois. À l'époque, la publicité reflète la bonne santé de l'entreprise qui reçoit 5 000 lettres de petits admirateurs chaque jour !

L'ARCHIVE.

L'archive disponible en tête d'article donne un bon aperçu de l'âge d'or de Poulain. Il s'agit d'un reportage réalisé dans l'usine en 1966, par les actualités régionales de l'ORTF. L'usine qui semblait neuve affichait pourtant déjà 140 ans. À l'époque le chocolat Poulain, c'était « trois millions de consommateurs, 8500 tonnes de cacao par an, 11 000 tonnes de sucre et 7 millions de litres de lait » !

La visite des lieux commençait par l'important site de stockage et sa succession de cuves scintillantes où étaient stockées les fèves de cacao en provenance du Cameroun, de la Côte d’Ivoire et du Ghana. Livrées brutes à l’usine, les fèves étaient nettoyées et triées sur place. C'était l'un des atouts de l'usine, largement mis en avant dans tout le reportage : son autonomie à tous les stades de la fabrication du chocolat. Alors que les restes des fèves, « tourteaux », allaient être pulvérisés pour devenir une poudre chocolatée, la liqueur, elle, suivrait sa propre route pour se transformer en tablette.

L'opération la plus importante était celle de la torréfaction, qui donne « l’arôme du cacao, donc du chocolat ». Les énormes torréfacteurs automatiques étaient chauffés à la vapeur, puis la fève était refroidie par air soufflé et concassée. C'est alors que commençait le long cheminement du cacao. Broyé, malaxé, fondu par une succession de machines aux allures futuristes, pour aboutir à la plaque de chocolat finale. Se succédaient de nombreux plans, à l'esthétisme léché, de la chaine de broyeurs, ces sortes de centrifugeuses qui permettaient d’obtenir le Graal, une pâte liquide : la « liqueur de cacao ». Elle contenait 55% de matières grasses. Les caméras de l'ORTF filmaient avec intérêt le processus minutieux. Mélangée au sucre, la liqueur était dirigée vers les pétrins automatiques.

Un « conchage » tout en finesse

Suivait une autre étape primordiale : le raffinage par « conchage » de la pâte pour obtenir sa finesse. La pâte était écrasée entre des cylindres d’acier, puis réduite en poudre. Poudre « conchée » qui serait à nouveau liquéfiée, avant de passer 48 heures dans des « conches longitudinales ». C'est ce conchage à 60 degrés, « qui donnait le velouté du chocolat », précisait le commentaire. Après un « coulage » à 30 degrés, le chocolat arrivait enfin aux moules compartimentés, placés sur une chaîne vibrante, pour chasser les bulles d’air. Après un long processus de refroidissement, arrivait un « homme important », le goûteur, qui « deux fois par jour, était chargé de goûter le produit fini ».

L'empaquetage se réalisait, lui aussi, à l'usine. Le reportage dévoilait les stocks de papier aluminium ou de papier cristal... Rien n'était laissé au hasard, jusqu'à l'impression du packaging, l'usine possédant sa propre installation d’imprimerie : son atelier offset, d’héliogravure, son atelier topographique et son atelier de sérigraphie. Soit 4 000 tonnes de papier et de carton par an, « et les feuilles mises bout à bout représentent dix fois le tour de la Terre ».

Le journaliste précisait en conclusion que l'usine Poulain était l'une des plus modernes d’Europe et qu'elle employait plus de mille ouvriers, « dont certains sont là depuis plus de 50 ans pour satisfaire, chaque jour, les gourmands les plus insatiables. »

Un lent déclin

Racheté par le britannique Cadbury en 1988, Poulain s'était diversifié en élargissant son offre de poudre chocolatée instantanée ou encore en créant sa pâte à tartiner. En 1991, cette diversification, impliquant un agrandissement et une modernisation du matériel, avait obligé Poulain à quitter Blois pour s'installer dans sa banlieue proche, à Villebarou. Ce fut aussi l'époque des premiers licenciements, avec la suppression de 160 postes.

Histoire de la maison Poulain
1994 - 07:37 - vidéo

Quelques semaines avant la démolition de l'ancienne usine Poulain à Blois, retour sur l'histoire de cette entreprise (avec un reportage des années 40), visite des lieux désaffectés avec un ancien ouvrier, puis présentation des nouvelles installations aux portes de la ville. Un reportage de 1994.

La marque de chocolat Poulain est détenue depuis 2017 par le groupe Carambar & Co, créé après le rachat par la société d'investissement Eurazeo. Groupe qui possède 14 grandes marques de confiseries (Carambar, Suchard, Lutti, La pie qui chante...).

Mais depuis le milieu des années 2010, la conjoncture a changé, plombant la productivité de l'entreprise. En 2023, la marque Poulain ne représentait plus que 4% de la consommation de chocolat des Français.

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